L'exposition Delacroix au Louvre.
Alors que le maître du romantisme français est décédé en 1863, et que la dernière exposition lui étant consacré eut lieu un siècle après sa mort, le Louvre et le Metropolitan Museum of Art de New York s'unissent pour proposer une exposition rassemblant la majeure partie des œuvres d'Eugène Delacroix, peintre du début du XIXe et tête de file du Romantisme, que les peintres modernes, tel que Courbet, ont longtemps considéré comme un maître.
L'exposition se déroule de manière chronologique, et suit les différentes œuvres de l'artiste, de ses débuts aux salons jusqu'à ses dernières œuvres teintées de nostalgie, alors à l'apogée de sa gloire, en passant par sa période Orientaliste; et présente, en plus de ses tableaux phares, des carnets de dessins, journaux, et dessins préparatoires, et s'interroge sur ses différentes inspirations et influences. Toute les connaissances que nous possédons sur le personnage, sa vie et son œuvre son abordées et synthétisées.
Lorsque l'on sort de l'exposition, une question vient à l'esprit: quel intérêt réel peut on trouver à présenter la vie d'un artiste dont on connait déjà presque tout, et dont peu de découvertes le concernant eurent lieu récemment ? De plus, la plupart des œuvres majeures de l'artiste sont déjà exposées au Louvre, la majorité du public y étant déjà familier, alors comment présenter une approche pertinente ?
Certaines expositions trouvent des approches intéressantes de certains thèmes tels que les méthodes de production, les sujets, symboles, etc... Mais certaines expositions se concentrent sur un sujet précis et déjà exploré. L'exposition Delacroix reprend et rassemble les œuvres d'un artiste important, et permet de créer, notamment au moyen du catalogue d'exposition, de mettre en place une production construite permettant d'aborder l'artiste avec toutes les informations possibles. Sans essayer d'apporter de nouvelles connaissances, le Louvre s'interroge sur les différentes sources d'inspirations du peintre, en étudiant certains documents, concernant par exemple sa collection d'art, qui permet d'expliquer une influence de l'art Hollandais du XVIIe siècle dans certaines de ses œuvres. Elle permet d'aborder la thématique de la guerre et de révolte dans ses jeunes années, son usage et ses références aux écrits Anglais de Lord Byron, écrivain romantique, ou bien de Shakespeare, dont le style intéresse notamment Victor Hugo.
Certes, on peut facilement accéder aux œuvres majeures de Delacroix, au Louvre. Mais chez un artiste connu pour ses œuvres de jeunesses, il est rare de pouvoir s'intéresser à ses œuvres plus tardives, voire ses dernières. L'exposition réussi à les mettre en lien avec le reste, et à en tirer certaines conclusions quant à son état d'esprit de l'époque. En effet, on observe une fréquente auto-citation et un retour sur des thèmes familiers, que l'exposition sait explorer, et que je vous laisserai découvrir. On peut aussi revenir sur ses différentes peintures dans lesquelles il expérimente avec les motifs floraux, ou bien avec les figures animales de chevaux ou de tigres, parfaitement maitrisées, et apparentées dans certaines œuvres tels que La Mort de Sardanapale, ou Le Massacre de Scio.
J'ai moi même été intéressé par quelques paysages de petits formats présentés dans une des dernières salles, provenant notamment de ses séjours en Normandie. J'ai pu remarqué, au fil des œuvres, que les paysages lointains de Delacroix se résumaient parfois à quelques coups de pinceaux, et fut ravi de pouvoir admirer le peintre dans un genre qui ne lui est pas familier.
La possibilité de mettre les œuvres dans une même pièce est aussi intéressante dans une perspective muséographique (qui concerne l'organisation des musées): cela permet de mettre en lien certaines œuvres, originellement éparpillées dans les salles du Louvre ainsi que dans de nombreux autres musées, accrochées dans différentes salles selon leurs tailles. La manière de les disposer entre elles permettent de dédier une salle aux différentes études concernant une œuvre fameuse, ou bien, d'une manière plus subtile, de mettre en évidence les ressemblances entres certaines œuvres, notamment entre La Grèce sur les Ruines de Missolonghi (ci-dessus) et La Liberté guidant le peuple, accrochées face à face.
Le catalogue d'exposition, mis en vente à ce jour au prix de 45€ (à vérifier), en vaut surement la peine. Ce genre d'exposition d'envergure sont rarement mises en place et permettent une rétrospective exhaustive d'artistes importants. Apportant un regard neuf, elles symbolisent la manière dont on doit sans cesse remettre en question l'histoire.
-Renaud